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Procès bébé secoué. L’association Enfance et Partage partie civile

Mes commentaires sur ce procès de bébé secoué :

L’association Enfance et Partage s’est constituée partie civile pour représenter ce bébé secoué. Le “présumé” coupable est le père. Les faits sont là et un enfant a vu son frère secoué.

Pendant ces 4 jours, les experts de justice se succèdent pour confirmer les faits reprochés à l’accusé : il a secoué le bébé. Un procès particulier où le syndrome du bébé secoué (SBS) est au centre du procès.

Article complet écrit par Yannick Lefrère sur le site de l’Observateur:

Assises du Nord. ” Bébé secoué ” à mort, un père clame son innocence

C’est un « papa formidable », un père « aimant, bienveillant, câlin, tendre et responsable », qui pourrait se retrouver 30 années derrière les barreaux.

Il lui est reproché d’avoir secoué à mort sa petite fille de huit mois en 2016 à Marquette-en-Ostrevent, près de Bouchain (59). La famille soutient le père, compagne y compris, mère de leurs trois enfants, une autre petite fille étant née après le drame. « Je ne serais pas là si j’avais le moindre doute qu’il ait pu faire quelque chose à notre petite princesse, a clamé la maman avec des trémolos dans la voix devant la cour d’assises, mardi à l’ouverture du procès à Douai, le renvoyer en prison, ce serait dévaster notre famille, je n’arriverai pas à vivre comme ça. »

« Mais vous n’étiez pas là », recadre l’avocate générale. C’était le 25 mars 2016. Après avoir récupéré ses deux enfants chez la nounou – le garçon de 3 ans et demi et la petite fille de 8 mois – le papa, un Douaisien de 31 ans au moment des faits, rentre à la maison et donne le bain aux enfants. Il prépare le repas du soir lorsqu’il entend des cris dans le parc où le bébé est assis. A deux reprises, il serait allé lui remettre sa tétine. Quand surviennent alors des pleurs, intenses, du bébé. Le père de famille décrit avoir retrouvé l’enfant « les yeux fermés, allongée, dans un état second. »

Des déclarations divergentes

C’est alors que tout se joue. Ses versions changeront à plusieurs reprises au cours de ses auditions par les gendarmes, semant le doute jusqu’à clamer plus tard son innocence. « Je l’ai prise à bout de bras, je l’ai un peu secouée mais comme lorsque je jouais avec elle, pas brusquement, elle était flasque, elle respirait mal, j’ai tenté le bouche à bouche. » Il évoque aussi un « choc » sur la tête, qui se serait passé précédemment, lorsque le bébé se serait propulsé en arrière à son arrivée dans le parc. A sa seconde audition, il parle d’une « accumulation d’erreurs » ce soir-là, liée à un « état de panique » conduisant à « une intervention inappropriée » avec « quatre à cinq secousses d’avant en arrière de la tête du bébé » pour « le faire réagir. » A la troisième audition, il revient sur cet état de panique face à l’inertie du corps de sa petite fille, « je l’ai saisie brutalement, je l’ai secouée plusieurs fois, j’ai dû faire un mauvais geste, sa tête a dû faire un mauvais mouvement. » Enfin, face au juge d’instruction, il dit l’avoir « soulevée brusquement une première fois par les épaules », puis l’avoir « prise par les aisselles et l’avoir secouée trois ou quatre fois sèchement, pour la stimuler. »

Inconsciente à l’hôpital

Le papa part alors aux urgences pédiatriques du CH de Douai. La petite fille est inconsciente à son arrivée. Une IRM cérébrale révèle des hématomes. Transférée à Jeanne de Flandre à Lille dans un coma profond, elle souffre d’hémorragie cérébrale bilatérale. Le pronostic vital est engagé. Maeva* décédera 12 jours plus tard. Le médecin légiste suspecte alors un syndrome du bébé secoué. A partir de ses constatations médicales, il réfute la thèse de la propulsion de la tête du bébé en arrière. Les experts médicaux concluent à une « mort encéphalique » de l’enfant, « conséquence directe et exclusive d’un traumatisme crânien » laissant présager un « syndrome du bébé secoué ou un accident de la route à grande vitesse en raison de la force nécessaire pour occasionner de telles lésions. » Aucun antécédent cardiaque ou respiratoire n’est relevé chez l’enfant.

Interdit d’assister aux funérailles

Le juge d’instruction ordonne alors la mise en accusation du père de famille pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Ce crime pour coups mortels est passible de 15 ans de prison. Sauf que deux circonstances aggravantes, sur mineur de moins de 15 ans et par ascendant, portent la peine encourue à 30 années de réclusion. Placé en détention provisoire pendant 8 mois, se voyant interdire d’assister aux funérailles de sa fille par le juge d’instruction – « je n’ai jamais su m’en remettre », dit-il en pleurs dans le box des accuses -, le père de famille a été placé sous contrôle judiciaire. Interdit dans un premier temps d’entrer en contact avec sa compagne et son fils, il a pu ensuite les retrouver. Le couple a quitté la région récemment pour tenter de se reconstruire avec leurs deux enfants.

” Une erreur de diagnostic médical majeure ” ?

Voilà donc ce couple durant quatre jours (jusqu’à vendredi) devant la cour d’assises du Nord. La maman ayant été entendue hier en qualité de témoin. La seule partie civile étant l’association Enfance et Partage représentée par l’avocat valenciennois, Me Broyart. L’avocat parisien de la défense, Me Etrillard, pose la question hautement sensible de ce procès : « Comment on s’en sort lorsqu’on vous dit : c’est sûr, c’est le syndrome du bébé secoué ? ». Pour lui, les critères retenus pour définir le « syndrome du bébé secoué » conduisent à de nombreuses erreurs judiciaires. Ce sera tout l’enjeu de ce procès. Il tentera de convaincre la Cour qu’il y ait pu avoir « une erreur de diagnostic médical majeure » dans cette affaire. Une expertise anatomopathologique a évoqué une infection pouvant laisser supposer une méningite foudroyante. Il déplore aussi que le carnet de santé du bébé ait été « perdu par l’hôpital Jeanne de Flandre. » Que, « dès le départ, dès la suspicion de syndrome du bébé secoué, le corps médical a posé un regard de défiance et a jugé ces parents. » « J’attends toujours le soutien du corps médical. Nous n’avons jamais eu de réponses sur la dégradation soudaine de l’état de santé de notre petite fille. Le jugement ne doit pas faire partie de notre travail », abonde la maman, elle-même aide-soignante. Devant la Cour, mardi, elle a évoqué « des vomissements à répétition de son bébé depuis un vaccin administré trois semaines avant » son décès, ainsi qu’une « tâche sur la lèvre, des problèmes respiratoires et des phases de sommeil beaucoup plus longues. »

Personnalité de l’accusé : un descriptif « élogieux »

Une enquêtrice de personnalité a dressé un tableau « élogieux », dixit la Présidente, de l’accusé, « sur 36 pages avec 20 personnes interrogées », appuie l’avocat de la défense. Le couple est décrit comme « fusionnel » depuis sa rencontre en 2006 et encore après le drame. La maman parle d’un « père extra, présent et disponible pour ses enfants, il rentrait de son travail le midi pour manger et passer du temps avec eux, il prend mon relais sans aucune difficulté lorsque je travaille. » L’avocat de la défense lui pose cette question : « La définition du syndrome du bébé secoué est un secouement tel qu’une personne extérieure verrait qu’il y a un danger de mort. Est-ce compatible avec votre mari ? ». « Non », répondelle. « On ne peut pas être un père aimant tel qu’on le décrit, et secouer à mort son bébé, ajoute Me Etrillard, il n’y a aucun élément dans l’enquête de personnalité qu’on puisse mettre en regard face avec cette accusation. »

« Interroger des petits enfants, comme à Outreau ? »

La Présidente lit, à la demande de la partie civile, l’audition du grand frère de la victime, alors âgé de 3 ans et demi et seul témoin de la scène : « Papa a dit – putain -, il n’était pas gentil, il l’a secouée beaucoup (…) ». L’enfant mime un mouvement de bascule d’avant en arrière devant les enquêteurs. Cette lecture fait bondir l’avocat de la défense : « On est à Douai ici, interroger des petits enfants, c’est ce qui a été fait dans l’affaire d’Outreau… », pour mieux sous-entendre le risque d’erreur judiciaire. La Présidente le recadre fermement : « Ici, un enfant est auditionné sur ce qu’il a vu, et pas sur ce qu’ils ont vécu comme à Outreau. »

La tension est palpable dans ce procès aux enjeux colossaux vu la peine encourue. « Je veux qu’il soit libre, qu’il reste avec nous, auprès de sa famille. Et je veux connaître la vérité sur ce qui est arrivé à ma petite fille », a réclamé la mère de la victime, mardi soir, à la barre. Me Etrillard va plaider l’acquittement de son client. L’avocate générale et l’avocat de la partie civile vont prendre la parole dans les prochains jours. D’ici là, des experts psychiatres et médicaux, et d’autres témoins, vont se succéder à la barre.

* prénom d’emprunt

Mots clés : procès, bébé secoué, coupable, tête secoué

 

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